
« Freelance : je t’aime, moi non plus… » Il est des moments dans la vie où l’on change presque radicalement de chemin, où tout est remis en question du jour au lendemain, où le chapitre s’interrompt sur une nouvelle page blanche à écrire.
Il y a trois ans, j’ai commencé une aventure solo-entrepreneuriale riche, intense, passionnante mais aussi extrêmement difficile. J’ai créé mon entreprise, j’ai accompagné des clients aussi bien de manière personnelle que via cette société (les activités n’étaient pas les mêmes), j’ai embauché des collaborateurs et réalisé du chiffre d’affaires.
J’ai connu de nombreuses réussites, des victoires fantastiques, j’ai appris énormément. Mais j’ai également vécu des périodes très sombres, fatigantes, démoralisantes. Lorsque l’on compare l’entrepreneuriat à un circuit de grand huit, ce ne sont pas des bêtises. Je ne compte plus le nombre d’insomnies, la pression omniprésente de savoir si je serais en mesure de payer mes salariés à la fin du mois, si je faisais du travail de qualité pour qu’ils n’aient pas l’impression de foirer leur carrière à mes côtés, si nous aurions suffisamment de clients pour subsister les mois suivants, ou si j’allais pouvoir me rémunérer correctement et survivre moi-même à cette aventure.
Cette pression m’a accompagné, quotidiennement, du matin au soir, week-end, jours fériés et vacances incluses. Ma vie n’a clairement pas été évidente, et franchement j’admire ma femme qui a su rester à mes côtés alors que je ne devais vraiment pas être facile à vivre tous les jours et qui a tant bien que mal supporté cette pression avec moi.
Malgré tout, être freelance reste une aventure incroyable sur bien des aspects. Tout d’abord car cela vous force à faire preuve d’une rigueur de travail, d’organisation et d’apprentissage. Cela vous force également à développer des compétences sur divers sujets, pas toujours en lien direct avec votre cœur de métier. Mais cela vous permet également une qualité de vie en termes de flexibilité, et d’équilibre entre vie privée et vie professionnelle, que l’on ne retrouve pas forcément lorsque l’on est salarié.
Autant vous dire donc que, malgré une année 2020 très compliquée me concernant -arrêt d’une mission chez un client à cause du premier confinement, fermeture de mon entreprise et licenciement des collaborateurs, manque de business et challenge pécuniaire personnel…- être freelance était ancré dans mes veines et mon état d’esprit. L’année 2021 démarrait plutôt bien, avec des contrats et des opportunités en nombre, comparé à l’année précédente. Et pourtant.
Alors que les perspectives de business en ce début d’année 2021 étaient très bonnes, j’ai finalement décidé de tout stopper, presque du jour au lendemain, pour reprendre une activité salariée.
Pourquoi j’ai décidé de redevenir salarié, presque sur un coup de tête ?
On parle d’ailleurs très souvent de personnes qui passent du statut salarié à celui de freelance, en plaquant tout du jour au lendemain pour vivre leur meilleure vie professionnelle. Spoiler : seule une infime partie de la population parvient à cet idéal de vie ! Par contre, on parle peu de ces indépendants qui quittent leur statut pour devenir ou redevenir salarié. Ce qui nous amène aujourd’hui au « pourquoi », après 3 ans d’indépendance, j’ai décidé de retourner au statut de salarié.
Un beau jour de mars, je suis contacté sur LinkedIn par une des recruteuses d’un cabinet de recrutement / RPO -le RPO est le fait de déléguer un.e Chargé.e de Recrutement directement chez le client, dans une logique de conseil et d’accompagnement sur des sujets de Relations Humaines (RH). Alors qu’elle me propose une opportunité salariée, équivalente à ce que je faisais en tant que freelance, je décline poliment en lui disant que si toutefois il y a des opportunités de portage entre leur société et leurs clients, pourquoi pas. Il est 18h passé, j’allais prendre ma douche.
Elle me répond très rapidement, et m’indique que malheureusement ce n’est pas forcément ce qu’ils recherchent, mais qu’elle transmet mes coordonnées et mon CV à son collègue, Responsable du Service RPO, et qu’il m’appellera pour échanger avec moi. Intelligent, mais vous la sentez venir, la suite ?
Le lendemain, ce responsable m’appelle. On discute brièvement au téléphone, et là… j’ai été bluffé.
Ce qu’il faut savoir, et je le répète, c’est que j’étais très ancré dans ma position de freelance, dans ce que cela pouvait m’apporter, et donc clairement pas disposé à redevenir salarié. Pour la petite histoire, ma dernière expérience en tant que salarié ne s’est pas bien déroulée, et à l’époque lorsque j’ai rencontré Jennifer (fondatrice de Bebold) on en discutait régulièrement et ce fût même un soulagement lorsque j’ai pu quitter mon dernier employeur. Alors on imagine bien que je montrais une certaine appréhension à l’idée de reprendre un CDI.
Passer d’un statut à l’autre pour accélérer sa carrière
Redevenir salarié ne signifie pas pour autant arrêter définitivement le modèle freelance. C’est pourtant l’idée que je me faisais de reprendre un emploi de la sorte : les contraintes du modèle salarial, à savoir les horaires, le fait d’avoir un supérieur hiérarchique, une baisse de rémunération significative en retrouvant notamment une part variable sur mon salaire, le manque de flexibilité, et l’impression d’être enfermé dans un contrat.
En rencontrant ce responsable qui m’avait déjà bluffé par téléphone, c’est finalement tous ces points qu’il a été en mesure de retoquer. Il m’a permis de prendre du recul et d’aborder la problématique sous un angle différent.
Mon expérience est principalement axée sur du recrutement dans la Tech (écosystème des start-up françaises, dont l’enjeu principal est l’innovation sur un plan technique, informatique). Et mon objectif professionnel à moyen terme est simple : faire partie de l’élite. C’est un peu prétentieux, mais je souhaite profondément être reconnu dans mon domaine comme un expert, quelqu’un que l’on va solliciter pour répondre à une problématique donnée. Un peu comme ces professionnels d’élite que l’on voit dans certaines séries américaines, que l’on va débaucher à coup de supplices et gros chèques parce qu’on sait qu’ils sont extraordinaires. Eh bien, c’est mon objectif (sans la dimension série US évidemment) !
Ce responsable m’a donc démontré par A+B après s’être profondément et véritablement intéressé à moi et mon expérience, qu’en rejoignant son équipe, on parviendrait à cet objectif et que l’on avancerait ensemble dans la même direction. On sort donc finalement du schéma classique du recrutement qui sert juste à augmenter les effectifs et offrir un bénéfice à une seule partie : celle de l’employeur. Il s’agit là d’une collaboration axée sur le Win-Win (gagnant-gagnant), et d’ailleurs en obtenant la validation de mon recrutement, le Directeur Général me l’a rappelé. L’idée est que l’on atteigne nos objectifs communs, mais pas qu’on envisage d’emblée un mariage sur le long terme. Autant vous dire que l’attitude de l’employeur fut vraiment très rassurante.
À ce sujet-là, ma femme, ainsi que ma meilleure amie, et d’autres très bons amis me l’ont dit : « Si tu reprends un CDI, ne prends qu’un CDI qui aurait un réel intérêt pour toi, pour ta carrière. » C’est effectivement ce que je conseille vivement !
L’idée de reprendre un CDI lorsque l’on est freelance ne devrait pas être liée à un sujet pécuniaire. Ne le faites pas juste parce qu’à un moment donné vous n’avez plus d’argent et qu’il s’agit de la solution de secours. Dans ce cas, vous courrez droit à l’échec, surtout si vous sautez sur la première opportunité venue. Si vous reprenez un CDI, posez-vous la question de savoir si cette opportunité va vous permettre d’atteindre vos objectifs à court ou moyen terme, surtout à une époque où les travailleurs changent en moyenne d’employeur tous les 2 à 3 ans.
La majorité des sollicitations provenant de cabinets de recrutement, avec une forte dimension commerciale, m’ont toujours rebuté. Il fallait donc non seulement que je chasse des clients, mais que je gère également les recrutements sur les mandats obtenus. Autant vous dire que le mieux dans cette situation est de rester freelance puisque ce sont les mêmes enjeux, sauf qu’en qu’indépendant, on gagne 10 000 € de plus par mois !
Au-delà des opportunités et des missions associées, il y a aussi la dimension humaine. À savoir, à quel point votre expérience va vous permettre de vous inscrire dans une dynamique de groupe, et comment vous allez pouvoir vous épanouir humainement avec les équipes en place. Ce que l’on appelle plus globalement le « culture fit ». Et cela fonctionne aussi avec les cabinets de recrutement mandatés par les clients finaux qui m’ont contacté. Par exemple, le cabinet qui vous chasse pour un client final a pour but de retranscrire l’ambiance et la mentalité générale de l’entreprise cliente.
J’ai eu le droit un jour à l’appel d’une chasseuse de têtes, patronne de son cabinet, pour un poste de Responsable Recrutement au sein d’une ESN avec une forte dimension projet (ESN : Entreprise de Services Numériques). Génial, très intéressant et effectivement en adéquation avec mes objectifs. Seulement, malgré ma détermination, mon expérience riche d’entrepreneur ayant eu lui aussi sa propre société, ça n’a rien donné. En fait, je pense que mon expérience d’indépendant n’avait rien de valorisant, et encore moins du fait que, malheureusement, ma boîte ait dû fermer. D’ailleurs, après l’envoi d’une lettre de motivation très complète, très détaillée, j’attends toujours le retour de cette dame, deux mois après. Finalement, avec du recul, je suis très content que cela n’ait pas abouti, car la dimension humaine était totalement absente.
Repasser salarié, en acceptant une offre répondant à mon écologie personnelle, c’est donc tout à fait faisable et même parfois une très bonne idée. Dès lors que vous avez préalablement défini certains points.
Rester concentré, analyser la situation et prendre la meilleure décision
Lorsque l’on envisage de faire cette démarche vers le salariat, il serait sage de fonctionner de manière méthodique et rigoureuse, et d’éviter d’agir parce que l’on est dos au mur.
- Anticiper pour vous laisser le choix.
Lorsque l’on est indépendant, il faut toujours garder à l’esprit qu’un jour ça peut être la fin. Si vous croulez sous les opportunités, passez directement au point suivant. Toutefois le business n’est pas éternel donc ce qui suit peut vous intéresser. En gardant à l’esprit que tout peut s’arrêter du jour au lendemain (#BigUpCovid), vous vous gardez une marge de manœuvre où vous allez pouvoir agir au bon moment, sans saisir la première opportunité qui se présente à vous et qui ne vous correspondra pas, juste parce que vous n’avez plus le choix.
- Définir vos objectifs professionnels.
Vous êtes indépendant ? Très bien. Mais pourquoi êtes-vous devenu indépendant ? Quels sont vos objectifs professionnels associés ? Où souhaitez-vous être dans deux, trois, cinq ans ? Comment votre expérience actuelle d’indépendant va-t’elle vous permettre d’y parvenir ? Une fois ces objectifs en tête, le statut n’a plus tellement d’importance, puisque ce qui compte, c’est surtout la manière dont vous allez parvenir à vos objectifs. Rappelez-vous, je le disais plus haut, mon objectif est d’ici trois ou quatre ans d’être un Recruteur d’Élite. Est-ce que le format indépendant à lui seul m’aiderait à y parvenir ? Non.
- Définir votre écologie personnelle.
Les objectifs c’est bien. Mais votre environnement personnel idéal est important. En tant que freelance, qu’est ce qui est génial dans votre quotidien ? Quels sont les points sur lesquels vous seriez prêt à faire l’impasse selon les opportunités qui se présenteraient à vous ? Par exemple, est-ce que pour vous, faire la grasse matinée un jour sur deux ou ne travailler que le matin, c’est primordial ou accessoire ? Est-ce que pouvoir travailler de n’importe où dans le monde, c’est essentiel ou juste un bonus agréable ?
Ce sont ces éléments qui vous permettront de savoir si l’opportunité salariale qui vous est proposée pourra vous correspondre, et cela vous permet donc de zapper d’emblée les opportunités ne respectant pas vos critères.
- L’opportunité proposée est-elle en tous points identique à votre activité de freelance ?
Cela concerne très probablement un nombre restreint de professionnels indépendants. Je vais donc aller dans le concret et parler de ce que je connais personnellement. En tant que Recruteur freelance, je devais à la fois faire du commercial, du marketing, gérer mes charges et recruter les collaborateurs de mes clients selon leurs besoins. Il était totalement inutile pour moi d’accepter toutes les opportunités ayant une forte dimension commerciale et recrutement. En effet, la seule différence serait qu’en CDI, j’aurais mon salaire assuré à la fin du mois. Si c’est votre objectif, donnez plutôt un coup d’accélérateur à votre activité et faites-le en freelance. Comme je le dis, ça ne concerne que quelques métiers, mais posez-vous toujours cette question.
Tous ces points sont donc essentiels si un jour vous devez revenir en statut salarié, ou si vous songez parfois à passer au salariat. Il faut prendre le temps de réfléchir et d’avancer avec les bons éléments pour être en mesure de faire les bons choix. Cela ne veut pas dire que vous y arriverez à coup sûr, mais au moins cela vous évitera certaines déconvenues.
Et après ?
Revenons à notre histoire. Passer salarié après trois ans d’indépendance n’a donc pas été chose simple. Vous l’aurez compris, les questions à se poser ne m’ont pas du tout traversées l’esprit à l’époque, si ce n’est celle de l’objectif. C’est pourquoi je vous conseille à nouveau d’être rigoureux dans cette démarche.
Mais en effectuant le processus de recrutement, j’ai très vite compris que cette entreprise respectait tous les prérequis que je pouvais avoir. L’entretien a été très qualitatif, très centré sur moi, sur ce que je voulais, mais aussi sur comment j’allais pouvoir m’inscrire dans la dynamique de l’entreprise sans entraver mes objectifs personnels.
Voilà pourquoi il ne faut surtout pas se précipiter. Il faut prendre le temps de la réflexion et ne pas hésiter à refuser les offres qui se présentent à vous et ne respectent pas vos différents critères. Passer ou repasser salarié lorsque l’on est freelance est souvent un très gros changement, avec des contraintes que vous n’aviez plus l’habitude d’avoir et c’est aussi un énorme challenge pour votre futur employeur.
Toutefois, cela peut être un très bon accélérateur de carrière avant de reprendre un statut d’indépendant à l’avenir, voire même, un CDD ou un CDI peut être un bon moyen de développer des choses en interne, en mettant à profit votre profil de « couteau-suisse » auprès de votre futur patron !
Qui m’a recruté ?
Pour finir sur cette chronique, j’ai donc été recruté chez Getpro. Getpro est un cabinet de recrutement et de conseil en recrutement très orienté Tech, qui travaille principalement avec des start-up et des ESN, et récemment des grands groupes. Développant deux approches, l’une basée sur le recrutement au succès, et l’autre sur l’accompagnement exclusif des clients par un consultant dédié (RPO), Getpro met en avant un processus de recrutement qualitatif qui s’appuie sur des tests psychométriques pour permettre de faire matcher un profil et un client de manière optimale. Leur processus de recrutement interne et l’onboarding (phase d’intégration d’un nouveau collaborateur au sein d’une entreprise) ont été d’une incroyable qualité, démontrant leur expertise en ces domaines.
Merci donc à Romain et Emile pour leur confiance, et à Adrien, Jihanne, Hermine, Anita, Thibault, Pierre, Tony, Oscar, et tous les autres pour le processus et l’accueil !